Ecrit par Alizée Aliotti
Introduction
Les jeux vidéo sont devenus l'un des passe-temps les plus populaires avec des millions de joueurs et de joueuses de tous milieux et de tous âges dans le monde entier. Les jeux vidéo offrent une expérience de divertissement immersive permettant aux joueurs et joueuses d'explorer des mondes imaginaires, de relever des défis, de résoudre des problèmes, de développer des compétences et de socialiser avec d'autres joueurs.euses du monde entier. Cependant, les jeux vidéo ont traditionnellement été conçus pour un public masculin, avec des protagonistes masculins, des scénarios centrés sur des thèmes masculins et des représentations sexistes et réifiantes des femmes. Cela contribue à la création d'une culture de jeu hostile envers les femmes à tous les niveaux.
Ainsi nous pouvons nous interroger sur la place actuelle et la représentation des femmes dans les jeux vidéos et l’évolution de cette représentation dans le temps. Comment sont considérées les joueuses ou encore les femmes travaillant dans l’industrie du jeu vidéo ? Quelle est leur place dans ce milieu considéré au départ comme exclusivement masculin ?

La représentation des femmes dans le jeu vidéo
À leur création, les jeux vidéo ont rapidement été considérés comme des jeux exclusivement réservés aux hommes. C’est ce que nous prouvent les nombreuses publicités des années 1980 telles que celles de SEGA ou encore de Nintendo (grands concurrents de l’époque).
Aujourd'hui, ces pubs sont perçues comme machistes. Les hommes sont au premier plan, et on comprend rapidement que la testostérone et la virilité sont de mise pour gagner.
À l’inverse, lorsque une femme apparaît dans une publicité, elle représente un obstacle entre l’homme et sa console. Elle n’est considérée ni comme une potentielle joueuse ni comme une acheteuse.
Pourtant, d’après une récente étude du SELL (Syndicat des éditeurs de logiciels de loisirs), il y a en France 51 % de joueuses et 49 % de joueurs. Nous pouvons donc en conclure que les jeux vidéo ne sont pas réservés exclusivement aux hommes et que les femmes s’y intéressent autant.
Mais alors pourquoi dans notre imaginaire les jeux vidéo ont longtemps été considérer comme exclusivement destinés aux hommes ?
Les "femmes frigos"
Une étude du site de jeux en ligne Solitaired menée par GameRant* (forum de Gaming) révèle que sur les 150 jeux vidéo les mieux notés sur IMDB (base de données en ligne sur le jeu vidéo et le cinéma), 69.3 % des jeux vidéo mettaient uniquement en scène un protagoniste masculin, contre 6 % seulement pour une protagoniste féminine. Nous pouvons en conclure que la représentation des deux sexes est très inégale dans le jeu vidéo.
Dans les années 1980, la majorité des jeux vidéo n'utilisaient les personnages féminins que pour faire avancer l’intrigue. Ainsi les femmes sont souvent tuées, agressées sexuellement ou autrement maltraitées pour motiver ou faire avancer l'histoire du personnage masculin principal. Pour décrire cette tendance, on utilise le terme de "femme frigo" (ou "Women in refrigerators" en anglais). Cette pratique est souvent critiquée car elle réduit les femmes à des objets de motivation ou de décoration pour les personnages masculins, renforçant ainsi les stéréotypes de genre négatifs. Les femmes sont souvent utilisées de manière déshumanisante dans ces scénarios, avec peu de développement de personnage ou de profondeur.

Le terme "femme frigo" tire son nom d'un exemple particulièrement notoire de cette pratique dans les bandes dessinées, où un des personnages féminins de la bande dessinée Green Lantern a été littéralement mis dans un réfrigérateur pour motiver les actions du personnage masculin principal afin qu’il devienne son sauveur pour faire avancer son histoire. Depuis lors, le terme a été étendu pour englober les scénarios similaires dans les jeux vidéo et dans d'autres médias. On peut citer comme femme frigo dans le jeu vidéo, la célèbre Princesse Peach qui se fait enlever et qui attend que Mario la sauve des griffes du grand méchant Bowser ou encore Ashley Graham dans Résident Evil 4 qui est la fille de l'ancien président des États-Unis qui fut retenue en otage par le culte espagnole Los Iluminados en tant que moyen de gagner le contrôle de la présidence.

La représentation des personnages féminins a évolué au cours de l’histoire du jeu vidéo.
Cependant, certains stéréotypes et tendances persistent encore aujourd'hui.
Historiquement, les personnages féminins dans les jeux vidéo sont sexualisés, stéréotypés, dotés de proportions corporelles irréalistes et de vêtements suggestifs. À l’époque, les personnages féminins sont présentés comme des objets de désir, comme des récompenses pour les joueurs. Ce sont souvent des stéréotypes tels que la princesse en détresse ou la femme fatale. On le voit très bien avec des personnages emblématiques comme Lara Croft ont encore Samus Aran. Ces personnages, on était créé pour des hommes par des hommes. Samus Aran est un personnage de la franchise de jeux vidéo Metroid créée par Nintendo. Elle est apparue pour la première fois dans le jeu Metroid en 1986, vêtue d'une armure de puissance futuriste. Au cours du jeu, le joueur n'a pas connaissance de l'identité de Samus, qui est révélée à la fin du jeu comme étant une femme. En effet, à la fin du jeu, Samus Aran se dénude en fonction du nombre de points du joueurs. Si le joueur finit le jeu rapidement, l’armure complète disparaît, dévoilant une Samus Aran en bikini, et en sous-vêtements si le jeu a été fini en moins d’une heure. Ici, le corps du personnage féminin est une récompense pour le joueur.
Lara Croft, elle, est souvent représentée avec des proportions corporelles irréalistes et portant des vêtements suggestifs, tels que des shorts moulants et un haut décolleté, qui sont peu pratiques pour les situations dangereuses qu'elle rencontre en tant qu’aventurière.
Lara Croft est toujours sexualisée à outrance et transformée en une sorte de mannequin pour photos érotisantes. Pour la promotion de Tomb Raider III de 1998, elle pose en petite culotte dans un lit avec une légende qui indique « c’est encore meilleur la troisième fois… ».
Dans le Reboot de 2013, le personnage de Lara Croft est souvent représenté comme étant en proie à la capture, aux blessures et à la vulnérabilité. Les animations de sa mort sont particulièrement épouvantables, et elle pousse constamment de petits gémissements qui renforcent son état de faiblesse. Dans une scène spécifique, le jeu montre Lara victime d'une agression sexuelle. Ces représentations suggèrent que Lara est une femme victime, en contraste avec son homonyme masculin Nathan Drake, qui est présenté comme un homme fort et puissant, un héros conquérant, un guerrier qui ne se blesse pratiquement jamais. Cette différence de traitement renforce les stéréotypes de genre et contribue à une représentation sexiste des personnages masculins et féminins dans les jeux vidéo.
Cependant, au fil des ans, les mentalités évoluent, la représentation des personnages féminins dans les jeux vidéo a commencé à changer à partir de 2015 avec Life Is Strange, Splatoon ... . Les personnages féminins deviennent plus variées, avec des caractéristiques et des histoires plus nuancées. Les personnages féminins deviennent des protagonistes avec leur propre personnalité plutôt que des objets de désir. Ils deviennent le sujet de leur propre histoire.
Les stéréotypes dans le jeu vidéo
Pour autant, les stéréotypes et les tendances machistes persistent toujours dans certains jeux vidéo. Les personnages féminins sont encore trop souvent sous-représentés avec moins de rôles principaux que les personnages masculins. Il est important de noter que les représentations des personnages féminins dans les jeux vidéo ont un impact sur la culture du jeu plus large et sur la façon dont les femmes sont perçues dans la société en général. Les représentations positives et inclusives des personnages féminins peuvent contribuer à une culture de jeu plus saine et inclusive, tandis que les représentations négatives renforcent évidemment les stéréotypes et les préjugés.
Les jeux vidéo illustrent les clichés de la société en reflétant les stéréotypes et les préjugés qui existent dans la culture populaire. En effet, les stéréotypes réduisent les individus à des caractéristiques superficielles. Ils sont basés sur des généralisations simplistes et souvent fausses sur les personnes ou groupes de personnes et ne s’intéressent pas à leur complexité et leur individualité. Ils renforcent les préjugés et la discrimination. Ils limitent les possibilités et les choix des individus en leur imposant des rôles ou des attentes basées sur leur genre, leur race, leur âge ou leur origine ethnique. Cela peut être particulièrement préjudiciable dans les domaines de l'emploi, de l'éducation et de la vie sociale. Ceux qui peut conduire à l'injustice et à l'inégalité en particulier lorsque les systèmes et les institutions sont biaisés contre les groupes minoritaires ou marginalisés. Les stéréotypes peuvent être utilisés pour justifier des politiques et des pratiques discriminatoires, ce qui peut avoir des conséquences graves pour les individus et les communautés.

Ainsi, un homme doit être grand, fort, viril, musclé. Une femme, quant à elle, doit être fine, blanche, avec des formes généreuses. Ces images (souvent morphologiquement impossibles) forment le socle des critères de beautés dans l’inconscient collectif. Ces stéréotypes s’étendent au-delà du jeu vidéo, on les retrouve souvent dans les médias : les magazines, le cinéma, les réseaux sociaux… .
Pour résumer, les stéréotypes sont dangereux pour la société, car ils ignorent la complexité des individus, renforcent les préjugés et la discrimination, limitent les possibilités et les choix, et conduisent à l'injustice et à l’inégalité.
![]() | ![]() |
---|